Nationale Zéro, (2003)

 

Pour photographier une route qui n’existait pas, il fallait la tracer. Au début de l’année 2003,  nous avons décidé de photographier l’Europe en suivant une route qui traverserait les vingt-cinq pays de l’Union de 2004, une transeuropéenne, la « Nationale zéro ». Nous avons voulu ramener des images de cette réalité. A quoi ressemble l’Europe ? Cette route à suivre ne figurait sur aucune carte. Nous étions dix à l’avoir dans la tête. Elle commencerait à Chypre et se terminerait à Gibraltar. Elle passerait par les dix Etats entrants, inconnus, et par les quinze anciens, méconnus. Nous avons acheté un break d’occasion. Nous avons découpé notre itinéraire imaginaire  en dix et confié à chacun une partie de cette voie à ouvrir, les uns après les autres. Une seule contrainte : s’arrêter, tous les cinquante kilomètres, et prendre une photo. Poser une borne photographique. A l’instant où l’un d’entre nous prendrait la photo, il ferait exister une portion de la route. Aujourd’hui cette route fait 23 000 kilomètres.  Elle est irrégulière, syncopée, illogique, anarchique. Elle est sans raccourci. La Nationale zéro n’est pas un sujet photographique. C’est un trait dans l’Union, dessiné en six mois, en se passant  le relais, d’étape en étape. Le reste, l’essentiel, est affaire d’aléas. Le hasard a mis sous nos yeux des gens et des paysages, des histoires. Des rencontres. Aperçues sur le bord de la route, posées, parfois, en travers. Chacun s’y est frayé son chemin.  Cette Europe est purement subjective. La Nationale zéro existe.

 

Voir le livre (éditions Filigranes, 2004)
 
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