Photographes / Celine Croze
Adiexodo (Impasse en grec)
2017-2018
Mars 2017, Athènes
Quand je suis arrivée là-bas, j’étais fascinée par le chaos qui submergeait la ville…ses nuits éternelles. J’avais la sensation de plonger à la fois dans le désordre et dans la naissance d’un nouveau monde.
Le quartier d’Exarchia, « zone sans police », peuplé de militants contre la misère sociale et de migrants, en était le symbole. Sur la place, je suis confrontée à une tout autre réalité : mafia albanaise, fumeurs de sisa et faux anarchistes errent comme des fantômes.
Les mains d’Hicham m’interpellent.
Il y est inscrit : « je m’ennuie au point que la mort me manque », et des bâtons rayés.
« — C’est quoi, les barres sur ta main ?
— Je compte les jours pour passer en Europe.
— Mais la Grèce, c’est l’Europe.
— Non. Ici, c’est comme chez moi : c’est la misère. »
Ces « barres » sur cette main et cet échange me hantaient.
J’étais confrontée à un pays devenu terre d’accueil tout en vivant simultanément sa propre crise.
Je voyais alors des êtres danser et s’accrocher à une situation sans issue, tels des héros de tragédies grecques.
Je décidai de pénétrer dans le monde de ces vies déchues. Ils devenaient la transposition métaphorique des mythes du pays que nous connaissons. Les personnes que je côtoyais étaient immergées dans des situations extrêmes : vol, vente de drogue, prostitution, déracinement ultime.
« Adiexodo » est une confrontation, une intrusion dans les nuits de ces âmes. Leurs corps étaient de nouveaux territoires qui me dévoilaient leurs vérités et leurs limites. Leurs cicatrices, des frontières impénétrables.


























